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« Livres en liberté » au Cameroun : « L’enjeu est de matérialiser le lien entre Haïti et l’Afrique », selon Philomé Robert

CAMEROUN – La 70ème édition de cette foire haïtienne du livre s’est déportée à Yaoundé, Mbalmayo et Douala  au Cameroun du 27 au 30 septembre 2022, avec pour invité spécial le journaliste et écrivain  Philomé Robert.

Après le Togo et le Bénin, c’était au tour du Cameroun d’accueillir ce festival littéraire organisé par la fille aînée de l’Afrique. Haïti qui se considère comme tel a entrepris, depuis quelques années, de faire vivre ce festival itinérant aux publics africains. Conduit par son promoteur Clément II Benoît, une série d’activités se sont tenues dans trois villes camerounaises (Mbalmayo, Yaoundé et Douala) avec pour objectif de donner à voir le livre et la littérature haïtienne. Rencontres entre public et acteurs du domaine des deux pays, conférences, expositions et dédicaces ont permis aux participants d’en savoir plus sur la littérature haïtienne, avec comme invité spécial le journaliste d’origine haïtienne, Philomé Robert dont le roman Vagabondages éphémères vient de paraitre aux éditions Caraïbéditions. Selon le poète Clément II Benoit, « Rendre des livres accessibles à un plus grand nombre à des prix réduits, permettre la rencontre des auteurs et hommes de culture haïtiens, c’est ce à quoi s’attèle cet évènement initié par la Bibliothèque Georges Castera du Limbé et soutenu par le Fonds national de l’Education de Haïti ». L’organisation de cette 70ème édition au Cameroun est rendue possible grâce au Rotary club du Cap-Haitien, au Rotary club Yaoundé Collines et au Rotary club Douala Madiba.

« Le principal enjeu c’est de matérialiser le lien entre Haïti et l’Afrique » Philomé Robert

www.noocultures.info : Depuis quand connaissez-vous le festival « Livres en liberté » et que pensez-vous que cet évènement ait apporté aux Haïtiens en termes de culture, livre et lecture ?

Je connais le festival depuis des années. Clément II Benoît qui est un ami d’enfance, se bat depuis longtemps pour imposer « Livres en Liberté » qu’il a créée en marge d’un autre grand évènement du livre en Haïti qui s’appelle « Livres en folie », qui est organisé à Port-au-Prince. Mais  il a décidé d’organiser « Livres en Liberté » en province, histoire d’apporter des livres à des gens qui n’y auraient pas accès sans cet évènement. Cet évènement a apporté une quantité de savoirs auprès des populations, des jeunes qui n’auraient pas accès à ces textes et à ces livres si « Livres en Liberté » ne les leur avaient pas apportés.

Quelle est la place de la lecture et de la littérature en Haïti aujourd’hui ?

La lecture et la littérature occupent une place majeure aujourd’hui en Haïti. Parce qu’elle est extrêmement foisonnante et riche, la littérature fait partie intégrante de la culture haïtienne. D’ailleurs, aujourd’hui si Haïti tient, c’est essentiellement grâce à la culture, la littérature mais également la musique, la peinture, la danse, la sculpture. Tout ce qui permet finalement de tenir ce pays en vie se passe par la culture. En ce qui concerne la lecture, c’est un petit peu plus nuancé dans la mesure où même si la population haïtienne consomme évidemment sa littérature, il ne faut pas négliger la situation de  l’analphabétisme dans le pays qui reste un défi majeur. Donc, on se rend compte souvent que des Haïtiens même s’ils s’intéressent à la littérature ne connaissent pas forcément  leurs grands auteurs; ce qui explique peut-être aussi que nombre d’entre eux sont d’abord connus ou édités à l’étranger et réédités en Haïti.

Être invité spécial pour cette édition 2022 au Cameroun, cela représente quoi pour vous et comment avez-vous vécu cette expérience ?

Invité spécial 2022,  je l’ai accepté avec fierté mais également avec humilité, compte tenu du fait que je viens de faire mon entrée dans littérature grâce au roman Vagabondage éphémères. Je ne suis pas un écrivain de métier, je tends à le devenir. Je l’ai vécu avec enthousiasme, je n’en ai raté aucune minute. J’ai rencontré des journalistes et j’ai vécu cette expérience de manière intense. Si j’avais à le refaire, je le referais volontiers.

On note de plus en plus un rapprochement culturel de Haïti vers l’Afrique (Haïti est par exemple le pays invité spécial à Conakry pour la prochaine édition des 72 Heures du Livre). Qu’est-ce qui justifie ce rapprochement et quels sont les enjeux ?

Ce qui justifie ce rapprochement, c’est la nécessité que ressentent de plus en plus de frères africains de se rapprocher de leurs frères haïtiens qui ont le sentiment d’avoir été oubliés, d’être abandonnés par l’Afrique dont Haïti est censée être la fille aînée. Donc, aujourd’hui sur le continent, il y a beaucoup de frères africains qu’ils soient Guinéens, Camerounais etc. qui décident de se rapprocher de ce pays grâce à la littérature et c’est une bonne chose. Les enjeux sont multiples. Évidemment, on pourrait penser à la géostratégie et à la géopolitique, c’est utile c’est important ; mais les enjeux sont d’abord avant tout, je pense, anthropologiques, culturels, mémoriels également. Puisqu’il y a une partie des Antillais dont les Haïtiens font partie (même si on se considère plus comme caribéens) qui ont un ressentiment vis-à-vis de l’Afrique. Ils considèrent, et ils n’ont pas tort, avoir été vendus il y a quelques siècles par leurs frères africains. Le principal enjeu aujourd’hui, c’est de matérialiser ce lien entre Haïti et l’Afrique, de faire en sorte qu’il soit plus visible, se ressente plus au travers de programmes, de manifestations et d’échanges. Que cela aille au-delà des simples cercles d’auteurs, de théâtre, de cinéma etc. mais que les peuples africain et haïtien se rejoignent et que le fossé qui les sépare soit rempli. Je pense que c’est le principal enjeu, d’où la présence d’Haïti aux côtés du Bénin comme pays invités aux 72 Heures du Livre de Conakry en 2023.

Pélagie Ng’onana ©www.noocultures.info

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